Faire l’école à la maison, comment ça marche ? 20/03/12

Selon le département des évaluations et de la prospective de l’Éducation nationale, le nombre d’enfants qui ne sont pas inscrits dans un établissement scolaire public ou privé serait d’environ 50 000 dont : 3 000 scolarisés à domicile et 47 000 suivants des cours par correspondance. Il s‘agit de familles n’ayant jamais scolarisé leurs enfants ou les ayant retirés de l’école. Ils suivent des cours par correspondance (par le CNED ou des cours privés), ou bien des pédagogies particulières (Montessori, Freinet, Steiner…). D’autres « homeschoolers » se servent de divers supports piochés ça et là, manuels scolaires, cahiers de devoirs, logiciels d’apprentissages… On laisse au vécu quotidien le soin de faire acquérir à l’enfant par lui-même diverses connaissances.

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ESTREPUBLICAIN.FR  - 10/02/2012

ÉDUCATION UN CLASSEMENT SANS SUITE SEMBLE SE PROFILER

PAS DE TESTS POUR L’ÉCOLE À LA MAISON

Ils avaient été entendus le 21 janvier dernier à la gendarmerie de Faucogney (Haute-Saône) après que l’inspection d’académie les avait signalés au procureur (L’ER du 21/01). Dimanche dernier, l’inspectrice de la circonscription de Luxeuil-lès-Bains a subi le même traitement. Invitée à se rendre à la gendarmerie de Faucogney pour une médiation au cours de laquelle les parents de Maelle (8 ans), Ewan (6 ans) et Zia (2 ans et demi), en ont profité pour rappeler les contours de la loi et de leurs droits.

Comme de plus en plus de familles en France, ce couple qui réside sur le plateau des Mille étangs a décidé d’instruire ses enfants en famille (IEF). Ce que permet la loi depuis 1882 que Jules Ferry a inscrit l’instruction comme obligatoire, pas l’école. Chez les Claudin-Taponnot, c’est Cristabel, la maman ingénieur en biologie, qui dispense les enseignements. Et a choisi l’instruction informelle comme méthode pédagogique. Chaque année, comme tous les parents qui choisissent l’IEF, un contrôle pédagogique doit valider la progression de l’enfant dans le respect de la pédagogie. « On a demandé par courrier à l’inspection d’académie des garanties sur les modalités du contrôle », explique Cristabel. « En réponse, on a reçu une convocation pour nous rappeler la loi et les peines encourues ». Maladresse qui a conduit les deux parties à se raidir… jusqu’au signalement.

Sous l’impulsion du substitut du procureur de Vesoul en charge des enfants, Issam El Abdouli, c’est la voie de la médiation qui a été choisie. « Et il semble qu’un accord a été trouvé selon les modalités fixées dans la loi », se réjouit le magistrat. C’est ni plus ni moins ce que réclamait la famille Claudin-Taponnot. « Devant les gendarmes, on a obtenu que l’inspectrice nous propose une date d’un contrôle sans comparaison avec le niveau scolaire d’une classe d’âge, et surtout sans test ». Un engagement que nous a redit Hélène Ouanas, l’inspectrice d’académie de la Haute-Saône. « La question des tests ne s’est jamais posée. Qui dit tests dit standardisation. Au cours des contrôles, on se base sur le dialogue, les traces disponibles ou sur ce que l’enfant a envie de nous montrer ». Aussi simple qu’un rappel à la loi.

Walérian KOSCINSKI

 

 ESTREPUBLICAIN.FR  - 21/01/2012

ÉDUCATION – L’INSPECTION D’ACADÉMIE DE HAUTE-SAÔNE A SIGNALÉ AU PROCUREUR UNE FAMILLE QUI INSTRUIT SES ENFANTS À LA MAISON

SIGNALÉS COMME DES DÉLINQUANTS

 

COURTOIS, les gendarmes de Faucogney (Haute-Saône) ont mis les patins en passant un coup de fil, et avant les fêtes, à la famille Claudin-Taponnot pour l’informer de l’ouverture d’une enquête la concernant. Deux mois que l’inspection d’académie « nous avait menacés de signaler notre cas au procureur ». Ce qui a été fait. L’objet de cette stigmatisation : la famille Claudin-Taponnot a décidé d’instruire ses enfants en famille comme la loi le lui permet et refuse de voir ses enfants soumis à des tests. Pour rappel, seule l’instruction est obligatoire de 6 à 16 ans, âge auquel les enfants doivent tous satisfaire à un socle commun de connaissances.

Entre les 6 et les 16 ans, comme n’importe quel professeur, les parents qui instruisent leurs enfants font l’objet d’un contrôle annuel de leur pédagogie. C’est sur ce point que les esprits se sont échauffés. Partisans des apprentissages informels, « qui s’appuient sur la curiosité naturelle et les rythmes de vie de nos enfants », Maelle (8 ans), Ewan (6 ans) et Zia (2 ans et demi) accrochent les wagons de la connaissance comme ils ont appris à marcher et à parler : quand ils sont prêts. Dans cet esprit, « on voulait une garantie écrite pour qu’il n’y ait pas de tests, pas de comparaison à un niveau scolaire et ce, dans le respect de nos choix éducatifs », explique Christabel, la maman, ingénieur en biologie de formation. C’est ce qu’elle demande à l’inspection d’académie en juin 2011 avant un contrôle prévu le 27 qui n’aura jamais lieu.

Depuis, la situation s’est tendue et la famille a fait l’objet d’un signalement au procureur « pour refus de contrôle alors que nous refusons simplement les modalités, comme des délinquants ». Une nuance qui n’a pas échappé au substitut du procureur Issam El Abdouli, en charge de ce dossier. Ce cas n’est pas unique en France mais concerne de plus en plus de familles qui font ce choix d’instruire leurs enfants à la maison. Devenu spécialiste, l’avocat niçois Cédric Plantavin déplore les options prises par les différentes inspections d’académie. Pour lui, « c’est l’éducation nationale qui ne respecte pas ce qui est écrit dans le code de l’éducation. Dès qu’on sort des clous, tout explose et les tests sont présentés de manière piégeuse ».

AUDITION CE MATIN

Cette crispation est d’autant plus étonnante qu’à une question posée par Éric Staumann (député UMP du Haut-Rhin) à Luc Châtel, ministre de l’Éducation en juin 2009, ce dernier avait rappelé les fondamentaux de la loi, notamment concernant les contrôles. Il rappelle que ceux-ci doivent se borner à établir « la progression de l’enfant en fonction des choix éducatifs des parents, dans le cadre du programme qu’ils entendent suivre, sans référence au niveau scolaire d’une classe d’un établissement d’enseignement public ou privé sous contrat ». Hors droit de réserve sur le cas d’espèce, Hélène Ouanas, inspectrice d’académie de la Haute-Saône, assure que les contrôles «sont basés sur la discussion, l’observation des traces produites sur l’enseignement et les évaluations précédentes. Ce ne sont pas des tests».

La nouvelle circulaire parue jeudi au bulletin officiel ne fait que rappeler ces notions de droit. «Le contrôle n’a pas, en effet, pour objet de valider le niveau scolaire ». De quoi illuminer l’audition que doit subir ce matin la famille Claudin-Taponnot dans les locaux de la gendarmerie de Faucogney.

Walérian KOSCINSKI

 

 

JOURNAL DES FEMMES  - 24/01/2012

Bernadette Nozarian 
 »Mes deux filles ont suivi l’instruction en famille »

par Audrey Achekian

 

Bernadette Nozarian, est maman de deux adolescentes qui ont pratiqué l’école à la maison. Retour sur son expérience.

Comment en vient-on à choisir l’éducation à la maison ?

Bernadette Nozarian : « J’avais lu un article là-dessus dans un numéro de Cosmopolitan, en Hongrie, dans les années 80. Il présentait de manière objective les avis des parents et celui d’un inspecteur. Je me suis dit « Si un jour j’ai des enfants, pourquoi pas ? ». Puis cela s’est inscrit dans une logique de vie : l’accouchement à la maison , l’allaitement, le co-dodo… Cela vient naturellement. Lorsque ma fille a eu 2 ans, je me suis dit que c’était trop tôt pour la mettre à l’école, alors je l’ai gardé à la maison. Je suis d’origine américaine et là-bas, on ne met pas les enfants si tôt à l’école.

Plus tard, je suis intervenue au CP pour animer des ateliers d’écritures et j’y ai emmené ma petite fille. Elle a voulu que je l’inscrive. Je l’ai mise à l’école 8 jours et ça a été terrible. Je sais que ça s’est très mal passé et elle n’a plus voulu y retourner. »

Est-ce à la portée de tous ?

Bernadette Nozarian : « Je pense qu’il faut d’abord une certaine réflexion personnelle sur le sens que l’on veut donner à sa vie, les choix que l’on veut faire. Il faut aussi s’en sentir moralement capable, se dire que l’on n’a pas besoin d’être bonne en tout, que l’on peut chercher, découvrir avec l’enfant (c’est d’ailleurs la trame du Maître Ignorant, de Jacques Rancière). Du côté des enfants, je pense que cela dépend de comment est l’enfant : autonome, indépendant…. Et cela change s’il est non-scolarisé ou descolarisé, la démarche, pour lui, n’est pas la même. Dans le premier cas, il a naturellement acquis des mécanismes de confiance en lui, d’acquisition spontanée des savoirs et sa curiosité n’a pas été entravée, dans le second cas, il y a du pain sur la planche… »

Comment se passait une journée d’école à la maison chez vous ?

Bernadette Nozarian : « Les filles se levaient à l’heure qu’elles souhaitaient. J’établissais des petits plannings sympas pour la semaine. J’avais imposé une base : français, mathématiques, histoire-géographie. Je me servais des passions de mes filles pour l’enseignement de ces matières. L’aînée étudiait beaucoup la musique, notamment avec l’aide d’un luthier. Je me basais sur les livres, je les emmenais au musée… Souvent, mes enfants allaient dans d’autres familles qui pratiquaient l’instruction à domicile. C’était une bonne manière de les sociabiliser et cela les aidait aussi pour certaines matières qui n’étaient pas mon point fort (les mathématiques notamment !) »

Quels sont les inconvénients de l’instruction en famille ?

Bernadette Nozarian : « Cela peut être l’isolement si l’on ne fait pas partie d’une association ou d’un réseau. Et surtout, concilier vie professionnelle, vie de famille, vie personnelle… car beaucoup de mamans de non-scolarisés sont des mamans solos. »

Pour les enfants, n’est-ce pas trop dur de se sentir exclu d’un système ?

Bernadette Nozarian : « Tant qu’ils ne connaissent pas l’autre système, pas vraiment. Mais il est important de voir d’autres familles qui vivent la même chose pour que les enfants se retrouvent, s’identifient et partagent des choses ensemble. Mais au final, se pose-t-on la question inverse ? N’est-ce pas trop dur de priver tant d’enfants de la possibilité de vivre une véritable enfance, ouverte sur toute sorte de gens, pas simplement ceux de son âge et de son quartier, et non de vivre une vie comme celle des adultes ? De se lever lorsqu’on a encore sommeil ? N’est-ce pas trop dur de ne pas apprendre selon son rythme et ses centres d’intérêts ? »


Quelles sont les règles fixées par la loi ?

Bernadette Nozarian : « Pour le programme, les enfants doivent avoir acquis le socle commun de compétence à 16 ans. Il y a un contrôle pédagogique tous les ans effectués par un inspecteur qui est censé évaluer les enfants sur ce qu’ils ont appris et non sur le programme scolaire. Il y a aussi un contrôle social tous les 2 ans, qui a pour but de vérifier que les conditions dans lesquelles étudient les enfants sont salubres et que la personne qui enseigne est saine d’esprit. Peu d’inspecteurs respectent vraiment les contrôles : ils cherchent à intimider les familles. »

N’est-ce pas difficile de réintégrer ensuite un cursus scolaire ?

Bernadette Nozarian : « Non, je ne crois pas. Je connais plusieurs jeunes non-scolarisés qui sont ensuite allés à l’université ou ont appris un métier. Cela s’est fait naturellement. Cela dépend du projet professionnel du jeune. En règle générale, ce que l’on peut dire, c’est que ces jeunes ont justement un projet précis, ils savent ce qu’ils veulent, ils ont appris depuis longtemps à penser par eux-mêmes et à être acteurs de leur vie, pas des marionnettes. »

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