Après plusieurs expériences infructueuses dans diverses structures en France, j’ai inscrit mon fils, à l’âge de 3 ans, dans un « Waldkindergarten » en Allemagne. Ce jardin d’enfants associatif en forêt (seule une petite roulotte en bois servait d’abri en cas de très mauvais temps), géré par les parents, était aussi différent qu’il est possible de l’être d’une école maternelle française et c’est bien cela qui m’a plu.
J’ai été séduite par de nombreux aspects, en premier lieu le fait que les enfants soient dehors tout le temps à un âge où mon fils adorait être dehors à courir ou contempler les plantes et les bestioles. J’ai aimé que les enfants soient très libres de leurs mouvements et activités (des activités étaient proposées mais rarement imposées). Comme le groupe restait le plus souvent à un emplacement donné (en général proche de la roulotte), les enfants pouvaient évoluer en liberté dans la forêt dans un rayon assez large autour des éducatrices. Le nombre d’enfants par éducatrices étaient tel qu’elles pouvaient être attentives à chacun (13 à 15 enfants pour 2 éducatrices).
J’ai en particulier apprécié le lâcher-prise des éducatrices en ce qui concerne la prise de risque et la sécurité : elles faisaient tout naturellement confiance aux enfants là où, en France (de ce que j’ai pu en voir), l’environnement est ultra-sécurisé, le personnel (et donc les enfants) est ultra-stressé et les accidents ne sont pas moins nombreux. J’ai vu les enfants, dès 3 ans, grimper aux arbres, observer de tout près des ruches, jouer au milieu des animaux de la ferme, apprendre à se servir d’un canif pour tailler un bout de bois, couper des légumes pour faire une soupe…
J’ai appris, grâce à ce kiga, à faire davantage confiance à mon enfant pour savoir ce qui est bon pour lui et à remettre en question le bien-fondé de mes peurs. Je suis devenue plus « cool » par la suite.
Par ailleurs, le déjeuner, préparé par les parents, était sain et bio, ainsi que les goûters que les enfants emportaient.
Et puis on y retrouvait les constantes de beaucoup de kindergarten allemands : période d’adaptation longue et flexible en fonction du ressenti de l’enfant et de ses parents, enfants mélangés de 3 à 6 ans, petite structure avec peu d’enfants au total, pas de programme scolaire, accueil uniquement le matin (avec éventuellement le déjeuner), parents impliqués dans le kindergarten et décisionnaires sur de nombreux points.
On était en effet, très très loin, de l’école maternelle.
Malheureusement, mon fils ne s’y est pas plu autant qu’on aurait pu l’espérer. Cela était sans doute en partie à cause de la barrière de la langue allemande qu’il était en train d’apprendre et à cause de son jeune âge. En plus, à un moment de grand stress au travail, j’ai dû le laisser de trop longs horaires (jusqu’à après le déjeuner). Il était habituel et considéré comme normal là-bas – sans que cela ne soit une obligation – que les petits de 3 ans partent avant le déjeuner. Par ailleurs, le travail demandé aux parents était énorme (préparation des repas, entretien et nettoyage à tour de rôle, réunions, tâches administratives diverses, préparation des fêtes et sorties etc.) et cela devenait lourd pour moi. Je ne pouvais m’empêcher de noter l’absurdité suivante : les parents passaient pratiquement autant de temps à travailler pour le kindergarten que leurs enfants y étaient gardés. Pourquoi, dans ces conditions, ne pas tout simplement passer du temps avec ses enfants sans toute la structure du kindergarten ?
Une certaine rigidité des parents par rapport aux principes du kindergarten m’a refroidie aussi, notamment par rapport à la nourriture saine et au mode de vie sain, aux activités « prohibées » car pas assez « nature ». M’agaçait également une certaine propension à se compliquer la vie pour des choses qui auraient pu être toutes simples, y compris dans la gestion du kiga. C’était comme si les mamans (qui dans la majorité ne travaillaient pas) avaient besoin de cela pour remplacer une activité professionnelle ; comme s’il fallait qu’elles s’occupent, se sentent utiles. Ou peut-être était-ce une façon de se sentir proches de leurs enfants ? Toujours est-il que c’était une grosse dépense d’énergie que j’aurais pu mettre au service d’un « programme non-sco » sur mesure. Ce que j’ai fait au bout de trois mois environ en désinscrivant mon fils.
AC – juin 2012