« Consultation » au ministère de l’Éducation nationale du 26 mai 2016

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Les associations LED’A, LAIA, CISE et UNIE, et le Collect’IEF ont été reçus au ministère de l’Éducation nationale le 26 mai 2016.

Pour représenter le ministère de l’Éducation étaient présents madame Moreau, directrice des affaires juridiques, LIJ, monsieur Noblecourt, directeur de cabinet adjoint de la ministre, madame Pétreault, inspectrice générale de l’Éducation nationale, Direction des affaires financières, Sous-direction de la vie scolaire, des établissements et des actions socio-éducatives, madame Capette de la DGESCO, madame Bizalion et monsieur Lewin, Direction des affaires financières et pour l’enseignement privé.

Nous avons été informés de la volonté du ministère de voir évoluer le cadre de l’instruction en famille :

  • Évolutions législatives concernant le lieu du contrôle qui appartiendrait à l’administration et l’injonction de scolarisation qui serait aussi possible suite à deux refus de contrôle.
  • Évolutions réglementaires sous la forme d’un décret qui préciserait la nécessité d’une progression continue dans tous les domaines du socle et de se référer aux attendus de fin de cycles pour la vérification de l’enseignement et qui introduirait dans le Code de l’éducation la soumission des enfants à des exercices écrits ou oraux lors de la vérification de l’enseignement.
  • Une nouvelle circulaire devrait aussi voir le jour, elle devrait réaffirmer la liberté de l’enseignement, indiquer les raisons qui motiveraient le choix du lieu du contrôle et que les parents ont une obligation de moyen non de résultat.

Lorsque LED’A et C’IEF ont exprimé que le lieu du contrôle ne devrait pas être à l’initiative des services de l’Éducation nationale, mais correspondre à l’intérêt des enfants et des parents, nous avons eu des réponses rassurantes sur la circulaire qui devrait indiquer les motifs possibles pour décider du lieu du contrôle.

À propos de la possibilité de mettre en demeure des parents de scolariser après deux refus de contrôle, le lien a été fait avec la décision du CE du 24 janvier 2014 qui concerne la communauté religieuse Thabita’s Place. LED’A a détaillé les possibilités actuelles dont dispose l’Éducation nationale qui sont bien plus rapides et protectrices pour un enfant s’il est réellement en danger.

Lorsqu’il était question du socle commun et des attendus de fin de cycles qui devraient aider les personnes chargées de la vérification de l’enseignement à apprécier si l’enseignement permet l’acquisition du socle, monsieur Noblecourt nous a indiqué que la circulaire préciserait que les parents instruisant en famille ont une obligation de moyen et pas une obligation de résultat. Nous (LED’A et C’IEF) avons indiqué que l’application des cycles aux enfants instruits en familles remettait en question la liberté de l’enseignement

Lorsque monsieur Noblecourt a évoqué d’inscrire les exercices écrits ou oraux dans le décret, aucun argument avancé par des associations et le C’IEF n’a été entendu. Il nous a indiqué que l’entretien des parents serait aussi inscrit, ce qui permettrait aux parents de s’appuyer sur le décret pour pouvoir être reçu par le personnel de l’Éducation nationale et faire part de leurs choix éducatifs.

Aucun point problématique de la circulaire n’a été évoqué; néanmoins toutes les modifications législatives et réglementaires annoncées restreignent les libertés des enfants et des parents et elles seront bien évidemment reprises dans la circulaire.
Les modifications devraient voir le jour en juin et la circulaire à la rentrée 2016.

Commentaires de LED’A
La discussion a duré deux heures et a été cordiale. A la lecture des modifications, il peut être difficile de comprendre pourquoi la réunion a été cordiale, mais les modifications législatives et réglementaires et la nouvelle circulaire n’ont pas été évoquées séparément. Dès qu’un point problématique à nos yeux était évoqué, des réponses rassurantes étaient données, la plupart seraient dans la circulaire. Ce n’est qu’en rédigeant les futures modifications qu’on perçoit la réalité, qu’il n’y a plus de liberté pour les enfant ni pour les parents. Monsieur Noblecourt a régulièrement dit que le nombre de recours montrait actuellement que le climat était tendu entre les services de l’Éducation nationale et les parents. Le souhait du ministère serait, à travers ses propositions, de réduire l’arbitraire et le nombre de recours aux tribunaux.
Vu les modifications, LED’A ne partage pas du tout cet avis.

Évolution législative
– « Le choix du lieu du contrôle appartiendrait à l’administration. »

Nous considérons qu’il n’y a pas lieu actuellement de modifier le cadre législatif.
Le Code de l’éducation est clair concernant le lieu du contrôle, c’est éclairé par la jurisprudence, aucune situation actuellement ne nécessite d’évolution. Le risque, déjà actuel, est que l’administration décide sans tenir compte de l’intérêt de l’enfant et des familles du lieu du contrôle. Le nombre d’enfants instruits en famille qui augmente est déjà actuellement une justification pour convoquer toutes les familles à des contrôles collectifs avec évaluations communes des enfants par niveaux et les parents sont vus à part sans leur enfant. Les difficultés organisationnelles risquent de primer sur l’intérêt des enfants et des parents.

– « L’administration pourrait suite à deux refus de contrôle mettre en demeure les parents de scolariser leur enfant. »

Nous considérons également qu’il n’y a pas lieu actuellement de modifier le cadre législatif. L’article L.131-10 prévoit déjà une mise en demeure de scolariser après deux contrôles jugés insuffisants. Des poursuites pénales sont aussi prévues lorsque les parents ne respectent pas l’injonction et un signalement peut également avoir lieu au procureur de la République. Ce sont peut-être plus les mouvements d’ajournement qui sont visés par cette modification; même si ce n’est pas le cas, ils seront les premiers impactés.

Évolution réglementaire
– « Le décret introduirait la notion d’acquisition des connaissances et compétences progressive et continue dans chaque domaine de formation du socle commun de connaissances. »
– « Le contrôle serait fait au regard des objectifs de formation attendus à la fin de chaque cycle d’enseignement. »
– « Le décret prévoirait la soumission des enfants à des exercices écrits ou oraux systématiques. »

Ces trois nouveautés suppriment la liberté de l’enseignement par le rythme continu qu’il introduit et par les objectifs liés aux fin de cycles. Nous sommes révoltés après avoir lu les attendus de fin de cycles. Ils privent totalement les enfants de leur liberté et remettent profondément en cause la liberté de l’enseignement. Les attendus de fin de cycle 2 (8 ans) prévoient en français par exemple de « Lire à voix haute avec fluidité, après préparation, un texte d’une demi-page ; participer a une lecture dialoguée après préparation » ou de « Copier ou transcrire, dans une écriture lisible, un texte d’une dizaine de lignes en respectant la ponctuation, l’orthographe et en soignant la présentation » ou de « Rédiger un texte d’environ une demi-page, cohérent, organisé, ponctué, pertinent par rapport à la visée et au destinataire. » Nous constatons déjà de nos jours que la plupart des exercices prévus sont des tests qui correspondent au langage de l’Éducation nationale et ne respectent pas les choix éducatifs, pédagogiques des enfants et de leurs parents.

Évolution de la circulaire
Une nouvelle circulaire devrait être rédigée. Des éléments très intéressants ou rassurants ont été donnés à l’oral :
– il y serait indiqué les raisons qui motiverait le choix du lieu du contrôle,
– elle garantirait la liberté de l’enseignement,
– elle mentionnerait que les parents ont une obligation de moyen et non de résultat.

Ces avancées pourraient être considérées comme intéressantes, cependant les circulaires ne sont pas vocables. Cela signifie que les familles pourraient invoquer la circulaire, mais qu’elle ne serait pas contraignante pour les services de l’Éducation nationale et pas utilisable pour un recours devant le tribunal administratif.

Nos propositions d’action
Allez voir vos députés, pour les informer que le cadre législatif et réglementaire actuel de l’IEF existe et qu’il fonctionne. Si vos députés sont PS, vous pouvez leur demander d’indiquer leur opposition à ce ou ces amendements pour éviter qu’ils ne deviennent une réalité. Nous ne comprenons pas les motifs du gouvernement à modifier le cadre actuel si ce n’est pour restreindre les libertés des enfants et des parents. Aucune situation d’emprise sectaire ou de radicalisation n’a été évoquée. De plus, lorsqu’il existe des inquiétudes au niveau des enfants, des dispositifs tels que les informations préoccupantes auprès du conseil départemental sont possibles. Si le danger est grave, le signalement au procureur est aussi possible. Aucun motif légitime pour une évolution législative n’existe.

Dans un contexte de réduction des coûts des administrations, nous redoutons encore plus d’arbitraires. Les contraintes de services pourraient motiver le lieu du contrôle et les modalités de vérification de l’instruction. Les modifications prévues par décret anéantissent la liberté d’enseignement. Les enfants sont ainsi privés de leur liberté et de leur autonomie alors qu’actuellement toutes les découvertes et les avancées dans le domaine des sciences de l’éducation montrent que la motivation intrinsèque de l’enfant et son enthousiasme sont primordiaux.
Pour réussir à préserver les libertés actuelles, plusieurs actions sont envisagées en plus de la sensibilisation de nos élus locaux, nous vous tiendrons au courant.

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